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samedi 10 juillet 2010

Good Girls go to Paradise, Bad Girls go to Las Vegas

Me voilà de retour au Rio pour le jour 2b du main event. Je n'ai pas couvert le jour 2a, puisqu'aucun joueur de ma Team n'y était, et en ai profité pour me prendre un day off (un de plus)

Le soir du day 1d, Harper, Jooles et moi nous sommes rendus au O'Sheas, un casino qui se veut à tendance Irlandaise, où nous avons retrouvé Kinshu, Ronan Monfort, Eric Sagne, Marc "Locsta" Inizan, Antony "Tallix" Roux, Nicolas Lévi, Bruno Launay et bien d'autres.... Nous avons disputé plusieurs parties de Beer-Pong avant de jouer le tournoi à $45 crap-shoot de deux heures du matin. Bilan: Locsta est mon nouveau Dieu du beer-pong, et Bruno Launais m'a gratté un dollar en me proposant un massage à la table de poker. Dure soirée.


J'ai profité de mon day off à ma manière: levé très tard, beaucoup bouquiné, puis je me suis baladé sur le strip une bonne partie de la fin d'après-midi, avant de me refaire la moitié de la première saison de Dexter.

Résultat: trop reposé, pas moyen de fermer l'oeil avant six heures du matin.

Je me lève à dix heures du mat', complètement dans le gaz, et retrouve Antonio au Starbucks pour le petit déj' devenu rituel: Venti Latte et Banana Nut Muffin. Dans la file d'attente du Starbucks, ça parle déjà poker. En gros, d'après ce que je comprends, les interlocuteurs racontent des mains où ils sont toujours les meilleurs joueurs du monde, et leurs adversaires des quiches finies. Ils jouent comme des Dieux mais n'ont pas eu de chance, et les mauvais ont gagné des pots qui leur revenaient de droit, voilà pourquoi ils reviennent au day 2 avec le même tapis qu'au départ du day 1. Je me demande si pour certains la mauvaise foi -liée au besoin systématique de se justifier- est livrée en prime quand on est joueur de poker. Passons.

Il y a un autre sujet qui me trotte dans la tête: j'ai remarqué qu'il y a un moment bien particulier dans les casinos, une sorte d'heure mélancolique, qui se situe généralement entre 3h et 4h du matin, et qui touche particulièrement les joueurs de machines à sous. Quand je rentre au Bally's dans ces heures-là, je remarque que ces joueurs dégagent un ennui presque palpable, et une sorte de désespoir sous-jacent qui flotte au raz de la moquette. C'est à se demander pourquoi ils persistent, puisqu'ils ont l'air de tout, sauf de s'amuser. Certains s'endorment carrément devant leurs bandits manchots, d'autres appuient mécaniquement sur le bouton "max bet" (mise maximum), attendant un gros lot qui n'arrivera pas. A croire que les machines à sous ont le pouvoir de garder ces joueurs désespérés quoi qu'il arrive, leur enlevant toute volonté de se lever et d'arrêter le massacre. Ces gens ne sont pas nombreux, mais quand j'en croise, je me retiens de leur demander quel plaisir ils trouvent à appuyer sur les boutons de ces slots, le visage et les yeux vides de toute expression, leurs mains crochetées sur leur verre, le cul écrasé sur leur fauteuil en skaï rouge. On les voit moins le week-end, puisque les gens jouent plus tard et que d'une manière générale l'animation ne faiblit que vers cinq heures du matin.

Cette nuit, vers quatre heures du matin, alors que je n'arrivais pas à dormir, je suis allé me chercher un truc à grignoter à la boutique de l'hôtel, et ai fait une rencontre assez rafraîchissante dans l'ascenseur: une immense Afro-Américaine accompagné d'un type plutôt insignifiant, qui a fixé les portes métalliques sans décrocher un mot. J'ai vite compris qu'il s'agissait d'une pute, à la manière dont elle était habillée et au grand sourire qu'elle m'a décroché, et je n'ai pas pu m'empêcher de penser: "C'est incroyable, elle vient de sauter ce type, et elle est prête à remettre ça."

"Got fun tonight, baby ?" J'ai presque sursauté au son de sa voix un peu criarde, et son client aussi ,d'ailleurs. Je fais partie des gens qui ont tendance à baisser le ton de leur voix quand ils parlent dans un ascenseur, comme si l'exigüité du lieu interdisait tout échange verbal, alors sa voix aigüe et enjouée me choque un peu. Je bredouille que j'ai passé une bonne soirée, merci, et que je m'apprête à aller dormir. Elle éclate de rire et me rétorque qu'il est dommage de se coucher quand il y a tant de choses intéressantes à faire dans la ville du péché, non sans m'assener un clin d'œil coquin. Elle doit sentir ma confusion, et quand les portes s'ouvrent, me lance un "Tu sais chéri, les gentilles filles vont au paradis, les vilaines se retrouvent toutes à Vegas" avant de rejoindre ses copines au bar, prête à ferrer un autre client. Elle a dû me prendre pour une sorte de puritain, et je me sens un peu comme un gosse qui passe devant une vitrine de sous-vêtements, à regarder obstinément droit devant moi, au cas où quelqu'un verrait que je regarde les strings et soutien-gorges....

Il m'a été encore plus difficile de m'endormir, après ça. Jusqu'à maintenant, j'avais toujours considéré les prostituées comme un impondérable lié à l'argent, et il y a beaucoup d'argent dans les casinos. Par conséquent, on y croise souvent des filles de petite vertu. Mais curieusement, je ne leur accordais pas plus d'attention qu'aux machines à sous: elles sont là, et c'est pas près de changer, et je ne me sentais pas particulièrement concerné. Mais celle qui m'a abordé dans l'ascenseur m'a fait marrer, avec sa dernière phrase qui se veut légère, mais aussi sans illusions. Lucide.

La journée au Rio se termine, et ce soir je rentre directement à l'hôtel: j'ai besoin de sommeil. Demain, les joueurs du main event sont en day-off. Je reviendrai néanmoins au Rio: Harrah's organise un tournoi des médias à midi pétantes, avec une structure bien crap-shoot, parfait pour envoyer des jetons un peu partout sans aucune stratégie, et toucher des cartes. Ça me changera. Et puis sait-on jamais, il y a quand même un trophée et un IPad à gagner.

2 commentaires:

  1. Hello, Merci pour ce blog super sympa... On croirait être sur place tellement les compte-rendus sont bien tournés...

    Bravo Manu, continue à nous faire rêver...

    @+

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